Pourquoi gérer son risque de perte ?

Cette loi célèbre du célèbre Sage d’Omaha met en exergue qu’on s’enrichit non pas en profitant des hausses du marché mais en limitant ses pertes dans les baisses. Cette loi est à la fois très simple dans sa formulation, très puissante dans son implication, mais extrêmement complexe dans son application. Les fonds en Euros offerts via les assurances vie répondaient bien à cette loi. Ils transféraient le risque de perte aux assureurs via leur gestion et l’adossement de leurs fonds propres. Il garantissait à l’investisseur son capital et une performance annuelle non négligeable sur les 20 dernières années de baisse des taux obligataires en France.

Malheureusement, les vaches grasses des fonds en Euros et de la gestion obligataire sont clairement derrière nous.  Generali, Allianz, et la Banque de France par la voix de son Gouverneur, François Villeroy de Galhau ont clairement annoncé que les investisseurs devaient maintenant s’adapter à l’impact des taux négatifs sur les perspectives de performance des fonds en Euros.

Cela veut-il dire que les fonds en Euros vont désormais avoir des rendements nuls ou négatifs ? Certes non, comme l’a rappelé la Banque de France. Tant que nous ne sommes pas confrontés à une remontée brutale, incontrôlée et non anticipée des taux longs, on peut penser que les fonds en Euros continueront à offrir des rendements positifs, et ce a fortiori si on tient compte des provisions engrangées dans le passé et de la capacité de gestion des assureurs à créer de la performance via d’autres classes d’actifs comme les actions ou l’immobilier.

Les fonds en Euros sont morts, vive la gestion en Unités de Compte !

Comme l’a rappelé Generali, les assureurs ont développé des plateformes très efficientes pour compléter voire remplacer les fonds en Euros. Ces plateformes référencent les meilleurs fonds de la place sous forme d’unités de compte. Elles sont le plus souvent totalement digitalisées et permettent ainsi des souscriptions et rebalancement de portefeuilles très efficients. Les coûts de ces rebalancements ont aussi fortement diminué et sont parfois proches de zéro. Les investisseurs ont donc à leur disposition une offre de marché efficiente et robuste pour construire des portefeuilles d’UC leur servant à recycler leurs fonds en Euros.

Comment définir le risque d’un portefeuille en UC et en particulier son risque de perte maximale ?

Lors de notre précédent article, nous montrions comment le concept de Value at Risk permettait d’aider un investisseur à définir son profil de risque et son adéquation avec son profil de risque. Ce test d’adéquation est au cœur de la loi Mifid. Cette loi crée une obligation pour les intermédiaires financiers de conduire ce type de test avant de distribuer tout produit financier.

La VAR est un bon indicateur de risque mais ne prend pas en compte l’espérance de rendement.

Comme nous le mettions en exergue dans cet article, la VAR donne à l’investisseur une réponse simple à la question très complexe qui est de définir son risque de perte sur un horizon donné. Cependant, nous mettions aussi en avance la limite fondamentale de cette approche. Elle se focalise sur le risque d’un portefeuille et non pas sur son espérance de rendement. Or, autant les risques financiers sont relativement stables sur le long terme. De fait, les crises financières se ressemblent souvent dans leur ampleur à travers des « bégaiements » de l’Histoire. Ceci reflète des invariants profonds psychologiques, économiques et financiers.

Comment anticiper l’espérance de rendement d’un investissement ?

Le problème fondamental et malheureusement difficilement traitable pour un investisseur est que l’espérance de rendement d’un portefeuille est très difficile voire impossible à anticiper. Ainsi, la performance depuis 1990 du Nikkei reste fortement négative à ce jour puisque le Nikkei est passé d’un plus haut historique à 40.000 à un plus bas à 7.000 et un niveau actuel de 20.000 soit une baisse de près de 40% sur quasiment 30 ans. Sur la même période, le SP500 des actions américaines a eu une performance de 756% !

On observe donc une très forte divergence entre le rendement des actions japonaises et américaines alors que leur risque est relativement similaire. De fait, leurs volatilités long terme et donc leur Value at Risk sont semblables.

Comparaison de la performance du Nikkei et du SP500 depuis 1980. On voit bien que les deux marchés ont des volatilités et donc des Value at Risk semblables. Cependant, leurs pertes maximales sont totalement différentes du fait de rendements totalement divergents.

Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n'est pas responsable de cette analyse.

Source : Bloomberg, Evariste Quant Research. Bloomberg LP n’est pas responsable de cette analyse.

Comment anticiper le risque de perte maximale ou « maximum drawdown » d’un portefeuille ?

La première question de tout investisseur, en particulier quand il recycle un fonds en Euros est à juste titre : « quel sera mon risque de perte ? » et ce avant même de savoir quel sera son espoir de rendement.

Or, il est mathématiquement et économiquement quasiment impossible de donner une réponse précise à une telle question. De fait, autant il est possible de gérer le risque d’un portefeuille et donc sa VAR via une gestion active, autant, c’est la structure même du marché et en particulier la croissance monétaire de la banque centrale, et la croissance économique des résultats des entreprises qui définit l’espérance de rendement d’un investissement.

Le maximum drawdown ou risque de perte maximale permet de concilier risque de VAR et risque de rendement

On voit donc qu’il est quasiment impossible de donner à un investisseur une réponse précise quant à son risque de perte maximale. Cependant, il existe des techniques qui permettent cependant de lui donner des indications.

La première est de calculer le risque historique de perte maximale. Cette analyse permet déjà de voir d’une manière historique quelle a été la perte d’un investissement similaire dans le passé. C’est la base de la notion de « maximum drawdown ».

Cette approche est déjà d’une grande puissance à partir du moment où l’on s’assure que l’horizon de temps est suffisamment long. Ainsi, les actions ont connu des maximum drawdown autour de 40% lors des différentes méga crises financières qui arrivent environ tous les 10 ans. Par contre, le maximum drawdown des obligations de la zone Euro ou USA sur les 20 dernières années a été faible si on retire la crise de l’Euro. Il faut donc prendre en compte des crises très anciennes comme celle des années Volcker où les taux longs USA étaient montés jusqu’à 13% avec une forte volatilité pour estimer le risque de perte maximale d’un portefeuille obligataire.

Comment stabiliser le risque d’un portefeuille ?

Stabiliser le risque d’un portefeuille est possible à partir du moment où les coûts de transaction sont suffisamment bas. Il consiste à ajuster l’exposition du portefeuille avec l’actif sans risque (fonds monétaire voire fonds en Euros tant que les taux restent stables).

Comment stabiliser le rendement d’un portefeuille ?

Par contre, stabiliser le rendement d’un portefeuille est beaucoup plus difficile. De fait, comme nous l’avons indiqué, le rendement d’un portefeuille dépend des conditions macro et micro économiques, ainsi que de la psychologie du marché (le célèbre arbitrage en prix et valeurs).

Un principe simple et reconnu, celui de l’optimisation de la diversification d’un portefeuille, permet déjà d’éliminer une grande partie du risque dit diversifiable (le fameux « bruit du marché »). Les assureurs offrent ainsi des fonds très diversifiés qui permettent ainsi d’investir dans des unités de compte déjà très diversifiés.

La construction d’un portefeuille, clé de la stabilisation de son rendement.

Mais la clé ultime de la stabilisation d’un portefeuille tient à sa construction globale. Plus il sera composé d’actifs décorrélés les uns avec les autres, plus sa performance sera stable sur le long terme.

La plus grande difficulté de la finance vient du fait que les actifs qui ont le plus performé dans le passé sont souvent ceux qui ont la perspective de performance la plus faible.

Le ratio de Calmar, pour quoi faire ?

Un ratio très intéressant et pourtant peu utilisé est le ratio de Calmar. Le ratio de Calmar mesure le rapport entre le maximum drawdown et la volatilité d’un investissement. Il vient donc compléter le ratio de Sharpe qui mesure lui le ratio entre le rendement moyen et le risque. On voit tout de suite que le ratio de Calmar est plus puissant que le ratio de Sharpe mais il est cependant moins populaire. La raison en est que rien ne garanti la stabilité future du ratio de Calmar pour les raisons de non stabilité des rendements futurs que nous avons mentionnés auparavant.

Pour beaucoup d’actifs « non gérés » le ratio de Calmar fluctue entre 2 et 3. Ainsi, les actions sont une volatilité qui fluctue entre 15 et 20% et un maximum drawdown dans les grandes crises financières qui monte autour de 45%.

Par une gestion très diversifiée en allocation d’actifs, on peut espérer baisser ce ratio à 1/1.5. Pour un risque de 8%, le risque de perte maximale baisse d’environ 16/24% à seulement 8/12%.

Conclusion, la gestion du risque de perte maximale, un objectif inatteignable ?

Comme nous l’avons expliqué, il est impossible d’avoir une grande certitude quant au risque de perte maximale d’un investissement. De fait, il dépend de la stabilité à la fois du risque mais aussi du rendement, or cette dernière est beaucoup plus difficile à stabiliser, même en diversifiant considérablement un portefeuille.

Les investisseurs peuvent cependant avoir déjà une vision plus claire de leur risque de volatilité via le concept de Value at Risk.

De même qu’il est impossible de stabiliser la trajectoire d’un bateau sans ajuster les voiles et le gouvernail, de même, il est impossible d’envisager de stabiliser les pertes d’un portefeuille sans avoir à ajuster continuellement sa composition pour lui permettre de s’ajuster aux modifications de la structure des marchés.

 

 

Source : La tribune libre https://www.boursorama.com/patrimoine/actualites/comment-gerer-son-risque-de-perte-sur-un-contrat-d-assurance-vie-

0 commentaires

Déposer un commentaire

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *