Placement fétiche des Français pour préparer leur retraite, les fonds en euros des contrats d’assurance vie sont confrontés à l’effondrement des rendements servis. Dans une récente note, Patrick Artus, directeur de la recherche de Natixis, estime que ce phénomène fait «disparaître la possibilité que le fonds en euros d’assurance-vie soit le support essentiel d’épargne des Français».

Aubaine pour les finances publiques – le coût moyen des nouvelles levées de dette de l’État aura à peine dépassé 0,1 % en 2019, avec des conditions de financement à taux négatifs pouvant aller jusqu’à la maturité de 15 ans -, la période historique de l’argent bradé est aussi le signe d’un terrible pessimisme pour l’avenir.

Il va bientôt constituer également un cauchemar pour les épargnants français.

Discours pessimistes

Plus une semaine ne s’écoule sans qu’une grande compagnie d’assurance présente en France ne lance sa propre mise en garde : oui, les rendements de l’assurance-vie en euros vont fortement reculer pour 2019.

Dernier avertissement en date, celui de CNP Assurances. «Il y aura effectivement une baisse significative des rendements», prévient son directeur général Antoine Lissowski. «L’essentiel est de préserver l’intérêt de nos clients sur le long terme et d’éviter de trop grandes disparités entre les produits.»

Mais ce double objectif n’est-il pas voué à l’échec ?

C’est le sentiment de Patrick Artus, le directeur de la recherche de Natixis. Dans une note, intitulée «Quelle réforme pour l’épargne en France ?», il estime que «les taux d’intérêt à long terme probablement durablement bas, puis en hausse, font disparaître la possibilité que le fonds en euros d’assurance-vie, investi essentiellement en obligations, soit le support essentiel d’épargne des Français».

Des rendements déprimés pour longtemps

Car, après l’érosion constante des rendements, une autre menace se faire jour. «Une remontée lente des taux d’intérêt à long terme va générer un rendement durablement négatif des portefeuilles obligataires», constate l’économiste. Certes, un regain des taux d’intérêt serait favorable à très long terme mais, durant la phase de transition, ce mouvement pourrait être source de moins-values latentes pour les assureurs sur les obligations détenues en portefeuille car une hausse des taux pénalise les titres existants.

Selon Patrick Artus, «cette perspective interdit que le fonds en euros de l’assurance-vie reste le produit essentiel d’épargne des Français».

Mais par quoi remplacer ce vaisseau-amiral de l’épargne financière des ménages qui concentre de 1.760 milliards d’euros d’encours ?

Deux solutions de remplacement

Deux solutions sont envisageables selon Natixis. Chacune avec ses atouts et ses faiblesses.

La première consisterait à transférer le fonds en euros dans le Plan d’Epargne Retraite (PER), créé récemment par la loi Pacte.

Problème : les cibles de ces deux solutions d’épargne ne sont en réalité pas les mêmes. Le PER s’adresse plutôt aux jeunes actifs tandis que l’assurance-vie, en raison de l’atout fiscal puissant sur les successions, reste attractive pour les épargnants plus âgés.

Actions, immobilier et Private Equity

L’alternative passerait par «la mise en place d’un nouveau produit d’épargne plus diversifié», avec davantage d’actions, d’immobilier, de Private Equity (actions dans des entreprises non cotées) et de leveraged loans (prêts à effet de levier).

Autant de classes d’actifs dont les rendements sont sensiblement supérieurs aux obligations.

Or, revers de la médaille, «avec la variabilité de ces autres actifs, il sera impossible de donner une garantie en capital à tout instant».

Cette nouvelle enveloppe diversifiée nécessiterait que les épargnant acceptent une garantie en capital seulement à moyen-long terme. Ou que cette nouvelle formule s’accompagne d’une garantie de limitation de la perte maximale en capital.

Reste une question cruciale : quelle sera l’avantage comparatif d’assureurs-vie qui ne seraient plus capables d’apporter des garanties en capital durables et à bon prix à leurs clients ?

Natixis se garde de répondre à cette énigme.

 

Le revenu : publié le 12/12/2019 à 07:30 – Mis à jour le 12/12/2019 à 07:30

https://www.lerevenu.com/placements/assurance-vie/lassurance-vie-en-euros-pourrait-perdre-son-statut-de-placement-prefere-des

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